À pareille étape de la saison écoulée, l'Espérance avait essuyé une défaite contre un nouveau promu, l'Espoir Sportif de Hammam-Sousse. Cela ne l'avait pas empêchée d'aligner des victoires, les unes après les autres, et finir, après quelques rebondissements, par être championne de Tunisie. Saura-t-on rééditer la performance ? Oui, si on devait retenir les leçons !
Le mental qui fait défaut ...
Les Sang et Or ont abordé leur derby forts de vingt-sept parties successives sans la moindre défaite contre les stadistes et rassurés de partout qu'ils partent favoris pour remporter ce championnat, sans la moindre difficulté. Le bureau directeur et le staff technique n'ont rien fait pour ramener les têtes sur les épaules. Tout à fait au contraire, notre coach se félicitait d'avoir le meilleur effectif en Tunisie, pendant que notre bureau directeur, qui a comme objectif ultime la Ligue des Champions africaine, ne semblait pas du tout concerné par les carences de l'effectif, qui « n'aurait pas de défaillances » selon M. Badine Tlemçani.
L'effet de ces déclarations tapageuses et de cette atmosphère d'excès de confiance ne peut être qu'une mauvaise préparation mentale pour les joueurs. Ainsi, dès que nos joueurs sont parvenus à ouvrir le score contre le Stade Tunisien (ST), ils ont cru qu'ils allaient circuler en voie libre et que la victoire était déjà acquise. Un relâchement visible et un manque de rigueur défensif flagrant ont été alors au menu. Le timing des deux buts stadistes, dans les arrêts de jeu de la première mi-temps puis juste après la reprise, viennent soutenir cette idée de relâchement mental.
Encore, nos joueurs n'ont pas été prêts à tous les scénarios. C'est vrai qu'ils ont réagi par leur instinct de guerriers et de gagneurs pour carburer à fond suite au second but stadiste, allant jusqu'à asphyxier l'adversaire dans son camp et semer la panique dans ses rangs, avec pour récompense une égalisation amplement méritée à vingt-cinq minutes des trois sifflets. Mais personne n'était là pour retenir cet élan suicidaire, ni pour rappeler les joueurs à l'ordre et au respect des schémas tactiques et du positionnement sur le terrain. Tous les joueurs, sans exception, ont quitté leurs postes et la charge du milieu de terrain a été supportée par Korbi à lui seul.
En admettant que le football se joue dans la tête et que les grands matchs doivent être préparés psychologiquement sous toutes leurs coutures, nous sommes en mesure de nous interroger sur la responsabilité du staff technique à ce sujet.
Les individualités ... et le collectif ?
La belle surprise de ce derby pour le public Sang et Or était un Eneramo dans la peau d'un capitaine. Le Nigerian s'est investi à fond dans tous les duels. Il a cherché à guider son équipe vers la victoire et a été comme à son habitude très pesant sur la défense stadiste. La surprise n'était pas son rendement, puisqu'il nous a habitués d'être notre fer de lance, mais plutôt sa volonté et son engagement. On l'a même vu revenir très profondément en défense dégager un contre adverse.
A côté de Mikael, il y avait un Darragi capable de tout faire. Notre jeune Msakni, quant à lui, a apporté le plus à l'équipe surtout en première période. Il devient plus précieux quand on lui évite de se coller à la ligne de touche. Korbi, de sa part, a assumé la charge de tout le milieu de terrain à lui seul et a également été généreux dans l'effort, réussissant à récupérer plusieurs balles lorsque tous ses coéquipiers traînaient dans la surface de réparation adverse. Il aurait pu être parfait s'il n'avait pas cherché à conserver la balle de manière superflue, une fois récupérée.
Or à part ces quatre joueurs, qui s'affichaient au dessus du lot, il y avait le vide. Et on ne peut pas gagner lorsqu'on n'a que quatre joueurs en forme. Mais le fait le plus alarmant est que notre jeu a été basé sur les individualités de Darragi et Msakni et sur la force d'Eneramo. La circulation et la remontée de la balle n'était pas fluide, vu l'éloignement des lignes. Les renversements de jeu et les diagonalisations qui auraient servi à la libération d'espaces étaient quasiment absents. Et si on rajoute à cela un Khalifa qui errait comme une âme sans peine sur le terrain, sans que le staff technique ne daigne délivrer l'équipe par un changement qui s'imposait à la mi-temps, question de rectifier le tir par rapport à un choix initial mystérieux, le tableau devient encore plus sombre.
Que dire de notre défense ? Nos joueurs manquaient de rigueur lors du marquage sur les balles arrêtées. Le placement et le replacement défensifs étaient mal exécutés, avec des retards inexplicables dans la plupart des mouvements. Le pressing, notre point fort lors de ligne droite de la saison écoulée, et même le repli défensif lors de la perte du ballon étaient inexistants. Il y avait suffisamment de défaillances pour expliquer les quatre buts encaissés, ce qui nous fait interroger par ailleurs sur le travail tactique effectué au cours de la préparation et d'avant-saison et du match.
Mot d'ordre : Repartir du bon pied ...
Il ne faut pas faire supporter à ce mauvais pas plus d'ampleur qu'il ne mérite. Les stadistes ont été chanceux d'avoir un taux de réussite exceptionnel, en réussissant à scorer à quatre reprises sur les cinq occasions qu'ils se sont créé, la plupart en contre. Faut-il aussi rappeler que l'arbitre a privé nos attaquants de trois penalties clairs et nets pour des raisons que seul Dieu connaisse. On dirait que cela devait faire partie du jeu ...
Il ne faut pas, sous l'effet de la défaite, oublier qu'il n'y a pas que des points négatifs. En fait, on a réussi à marquer deux buts, on a dominé notre adversaire dans la plupart du temps, on a créé des occasions nettes, on a vu de belles actions et on a récupéré un Eneramo des beaux jours ...
Cette défaite ne doit pas nous laisser sombrer dans le doute. En fait, les Espérantistes savent mieux que tout le monde que les mauvaises performances leur ont toujours servi pour se remettre debout, les rendre plus forts et plus décidés à repartir de plus belle. À condition que toutes les leçons soient tirées de ce cynique revers, si Benzarti et les membres du bureau devaient nous lire.
À bon entendeur !