Le monde footballistique tunisien est en ébullition, et comment ? L'Espérance Sportive de Tunis (EST) défraie la chronique et ça arrange tout le monde, les médias bien entendu, les «antis» bien évidement et voilà que même nos supporters sont entrainés dans cette frénésie.
Nous autres, les véritables espérantistes, nous savons bien que notre club ne laisse personne indifférent, qu'heureusement, dans la plupart des cas, l'Espérance fait la «Une» grâce à ses titres et ses résultats probants, que tous les non espérantistes essaient de mettre leurs grains de sable une fois le doyen des clubs tunisiens, fait un faux pas et essaie de rectifier le tir.
LES CONSÉQUENCES DE LA COUPE D'AFRIQUE
Essayons de comprendre ce qui se passe actuellement du côté du Parc B : L'Espérance Sportive de Tunis avec toutes ses composantes a trop misé sur la Ligue des champions; depuis deux ans, l'équipe a retrouvé son lustre, un effectif assez riche et varié, un entraîneur – Faouzi Benzarti – connu et reconnu pour ses qualités et ses quelques défauts et un président qui a tout fait pour que notre équipe retrouve son leadership. Les résultats ne se sont pas fait attendre : deux titres de champion de Tunisie d'affilée, une coupe arabe sans parler de la coupe de l'UNAF. Mais l'EST lui manquait la ligue des champions africaine et tout a été fait pour construire une équipe capable de la remporter. Seulement voilà, remporter une compétition devant une quarantaine d'équipes africaines dont une dizaine de grosses pointures, n'est pas si aisé que cela puisse paraitre, surtout ces dernières années où il y a eu un nivellement de valeurs entre les différents clubs du continent noir.
L'Espérance qui a mal débuté le 21ème siècle, ne pouvait du jour au lendemain redevenir un ogre africain, les mercati sont devenus difficiles, les bons joueurs tunisiens sont devenus une denrée rare et les étrangers très chers vu la concurrence déloyale avec les pays européens qui guettent le moindre « espoir » africain pour l'enrôler, sans parler des équipes du Golfe, qui ne lésinent pas sur les moyens, en déboursant un argent fou pour n'importe quel joueur qui perce en Afrique. Résultat des courses, on domine facilement les compétitions nationales, mais les compétitions africaines, ce n'est pas de la tarte, d'autant, qu'à part la valeur intrinsèque des équipes qui participent à ces compétitions, il faudrait avoir des entrées à la CAF et savoir préparer nos rencontres, ce qui n'a pas été le cas pour notre club.
Malgré
tous ces aléas, l'Espérance est arrivée à la finale de la Ligue des
champions après un parcours assez mitigé lors des éliminatoires, une
phase de poules digne d'un grand club en arrivant en tête du classement
devant le champion en titre le TP Mazembé, une qualification au forceps
en demi-finale face à Al Ahly et la débâcle de la finale. Mais être vice
champion d'Afrique deux années après que l'équipe était loin du niveau
continental est une prouesse digne d'éloges. Une équipe jeune,
inexpérimenté, sans joueurs cadres et chevronnés, sans influence auprès
de la CAF. Et puis, des fautes ont été commises, surtout au niveau du
staff technique et il est inutile d'y revenir.
Il faudrait dire
aussi, que les supporters de notre équipe ont leur part de
responsabilité : encenser des joueurs dès qu'ils enchaînent deux ou
trois bonnes rencontres et mettre dans leurs têtes qu'ils sont désormais
des stars internationales, ne regarder que les bons résultats et
focaliser les mauvais résultats sur l'arbitrage, la CAF, le climat,
l'adversité quand on joue en déplacement et les difficultés des safaris
africains et occulter nos faiblesses, a fait que tout le monde croyait
dur comme fer que la Ligue des champions allait atterrir à Bab Souika.
La désillusion était énorme, une fois on a été éliminés; toutes les
composantes de l'équipe – joueurs et staff technique, sans oublier les
supporters – ont pris un coup de massue et seul un véritable
bouleversement dans la continuité pourrait remettre l'équipe sur les
rails.
Notre équipe est certes toujours leader du championnat, mais depuis la fin de la Ligue des champions, nos joueurs ont tous régressé ou presque, le moral est loin d'être au beau fixe, la flamme est éteinte et la confiance fuit toujours nos joueurs qui manquent cruellement de caractère, d'autant que dans l'entourage et depuis le départ de Benzarti, aucun n'a l'expérience nécessaire pour faire sortir tout ce beau monde de leurs léthargies, notre salut, heureusement, est dû à ce que nos dernières rencontres étaient face à des équipes de moyen calibre pour ne pas dire autres choses et nos adversaires directs n'étaient pas non plus au top et ont fait chacun de son côté beaucoup de faux pas. Mais on doit se rendre à l'évidence, la prestation de l'équipe face à l'AS Gabès, l'AS Marsa et le CS Hammam-Lif est loin de nous rassurer, d'où la décision sage à mon humble avis d'injecter du sang neuf à tous les niveaux. Le mercato va nous ramener, je l'espère, des joueurs talentueux, expérimentés et motivés qui ont envie de remporter des titres nationaux et internationaux, mais M. Hamdi Meddeb a vu juste en faisant des remaniements profonds au niveau du staff technique et administratif.
La polémique tourne autour de l'éviction de Maher Kanzari et la nomination de Nabil Maâloul.
LE DÉPART DE MAHER KANZARI
Beaucoup ont espéré que Kanzari continue à mener le navire de l'EST, d'autres trouvent son éviction logique, mais la manière inélégante; enfin beaucoup n'ont pas apprécié la nomination de Nabil Maâloul en tant qu'entraîneur en chef de notre équipe, certains avancent sa «trahison» envers son équipe de toujours et d'autres avancent des arguments purement techniques, mettant en relief les échecs de Maâloul quand il a entraîné par le passé des équipes tunisiennes.
D'abord, concernant Kanzari, la loi du foot est implacable, soit on accepte cette loi certes inhumaine, cruelle et atroce, soit on ne fait pas le métier d'entraîneur. D'ailleurs, les entraîneurs sont grassement payés par rapport aux salaires des tunisiens, principalement à cause de la versatilité de ce métier ingrat et stressant. Kanzari a passé presque 4 ans chez nous, c'est presque une petite carrière, vu les changements fréquents d'entraineurs en Tunisie, il a fait grosso-modo un bon boulot, il a été un second très dynamique, il a su mener la barque à chaque fois qu'il a exercé un intérim, mais un fait est là, on sent que l'équipe stagne depuis quelques semaines, que Kanzari qu'on le veuille ou non, est une copie de la paire Benzarti-Kanzari, avec moins de roublardise et d'expérience, puisque Benzarti n'est plus là, de plus beaucoup craignent à juste titre le copinage et le manque de rigueur qui pourrait caractériser l'ère Kanzari, enfin tout le monde a constaté que nonobstant les résultats, la manière et la motivation des joueurs n'est plus de mise depuis quelques temps déjà. Laisser cette situation ambiguë durer serait une faute que le président du club n'a pas voulu prendre le risque de faire. Le changement parait donc très logique, d'autant que c'est maintenant où jamais, car c'est au mercato de l'hiver qu'un entraineur peut préparer la ligue des champions, en juin, aucun entraineur ne peut prendre le train en marche sans faire de dégâts.
LA DÉSIGNATION DE NABIL MAÂLOUL
Alors pourquoi justement Nabil Maâloul ?
D'abord, un mot sur ceux qui ne veulent pas de lui car il y a 15 ans ou plus, il a porté le maillot du Club Africain et a effleuré ce maillot avec ses lèvres, une fois il a remporté la coupe arabe face à notre grand rival l'Étoile du Sahel à Sousse même. Franchement, je trouve risible celles et ceux qui se basent sur ce fait pour refuser Maâloul chez nous, d'autant plus ridicule que la majorité de ceux qui sont contre, sont jeunes et n'ont vu cette scène que sur une vidéo de mauvaise qualité ou par ouïe dire et n'ont pas vécu les dessous de cette affaire que même Maâloul a regretté. Avec tout le respect que j'ai pour cette frange de notre public, engager un entraîneur en se basant sur des critères qui sont extra-sportifs ne mérite même pas qu'on ne s'y attarde. Mais un dernier mot avant de fermer cette parenthèse, pour toutes celles et tous ceux qui n'ont pas vécu l'ère de Maâloul en tant que joueur, je rappelle que Nabil en tant que joueur était un géomètre hors pair, un des grands qu'a enfanté notre club, il a été un génie créateur, mais aussi un meneur d'hommes et il a fait partie à une certaine période du trio magique, sans doute le meilleur de tous les temps chez nous à l'Espérance et probablement en Tunisie, voire en Afrique, et qui a charmé tous les férus du foot, même les anti-espérantistes : Khaled Ben Yahia - Nabil Maâloul - Tarek Dhiab, sans oublier que Maâloul est un enfant du club, issu d'une famille d'espérantistes notoires et que c'est vraiment vil et immonde de douter de l'appartenance de Maâloul à la famille des Sangs et Or.
Maintenant, essayons de deviner pourquoi Hamdi Meddeb a choisi Maâloul ?
On ne doit pas oublier une chose, notre équipe a de la qualité, beaucoup de nos joueurs ont du talent et si, actuellement, ils jouent en deçà de leurs valeurs intrinsèques, c'est que physiquement, ils sont cuits et surtout mentalement, ils sont hors du coup. Et dans l'immédiat seul un entraîneur tunisien peut comprendre la mentalité de nos joueurs et sait parler leur langage. Un étranger, même de haut niveau, peut passer à côté de la plaque, s'il n'arrive pas à comprendre le blocage de beaucoup de nos joueurs.
Un entraîneur tunisien, qui a de la forte personnalité doublée d'un meneur d'hommes qui comprend l'état d'esprit des joueurs tunisiens, avouez que ça ne court pas les rues. Benzarti est parti et a fait son temps, Zouaoui n'est plus comme avant et a échoué chez nous sous l'ère Hamdi Meddeb, il ne reste à mon avis que Ammar Souyah et Nabil Maâloul, Ammar étant engagé en Équipe Nationale Olympique, reste alors Nabil Maâloul qui a ce profil. On va nous dire mais un entraîneur doit être surtout compétent, j'en conviens, mais quels sont les critères qui nous montrent que Maâloul n'est pas compétent ? On sait tous que quand il a entraîné le Kef, le CAB ou même le CA, il a eu des problèmes extra-sportifs, le seul critère objectif qu'on doit prendre en compte c'est son parcours avec l'Équipe Nationale en compagnie de Roger Lemerre et là, son parcours est plus que positif. Je me souviens d'une émission à la TV tunisienne, lors de la Coupe d'Afrique des Nations en 2004, au début de la compétition, alors que la Tunisie était loin d'être favorite, Maâloul a eu une discussion animé avec Mejdi Abdelghani, qui ne voyait pas la Tunisie aller loin, et Maâloul a surpris tout le monde en lui certifiant que la Tunisie non seulement va aller loin lors de cette CAN, mais elle va être sacrée championne d'Afrique et il a expliqué les raisons de son optimisme. On sait tous qu'à la fin, la Tunisie était sacrée championne d'Afrique au nez et à la barbe – au vrai sens du terme – de Abdelghani.
Alors pour conclure, la désignation de Nabil Maâloul à la tête de notre équipe fanion est logique, il a accepté le challenge, à lui de démontrer ses capacités. Personne ne va lui faire de cadeaux, Hamdi Meddeb en premier ! Seuls les bons résultats et les prestations de l'équipe peuvent l'aider dans sa tâche. S'il réussit dans sa mission et dote l'équipe d'un fond de jeu appréciable, avec des résultats probants, nous serons tous heureux qu'il continue l'aventure avec nous, s'il ne réussit pas dans sa mission, il quittera le navire tout seul, j'en suis persuadé et sans crier gare, sachant que sa fibre d'espérantiste ne lui permettra pas de continuer avec nous si, par malheur, il échoue dans son entreprise.
Tout ce qu'on espère, c'est que Nabil Maâloul qui a caressé ce rêve depuis fort longtemps de prendre en main son équipe de toujours, réussisse à mettre en pratique ses idées et gagne son pari, il a le feu vert et les coudés franches de son président, il a un effectif riche et d'assez bonne qualité et qui va être renforcé durant ce mercato, il sera entouré par un staff varié qu'il a choisi lui même et aura le temps nécessaire pour préparer sa mayonnaise. Nous autres les véritables fans de Bab Souika, on ne peut que lui souhaiter la bienvenue chez les siens et s'attendre à ce qu'il hisse notre équipe à un niveau supérieur.