
...
MERCATO : Voilà un mot qui est devenu à la mode ces dernières années en Tunisie. Pis, c'est devenu tout simplement un phénomène de mode incontournable et nécessaire dans la vie des sportifs actifs, mais aussi passifs, à telle enseigne qu'il commence à concurrencer sérieusement la compétition en elle-même et risque à ce rythme de damer le pion à celle-ci en devenant l'attraction n°1 du sport roi en Tunisie.
Au Parc B pour ne parler que notre club et depuis quelques années, chaque semestre est une véritable foire du trône qui s'installe. On nous promet monts et merveilles, on met tous les espérantistes en ébullition, la pression monte, l'adrénaline aussi, le rêve domine nos nuits voire nos jours, puisqu'on rêve même les yeux ouverts. Les médias tous confondus profitent de l'aubaine et font soit le jeu de notre BD soit celui de nos adversaires en mettant les bâtons dans nos roues, selon qu'ils sont des journalistes espérantistes ou anti.
Tout le monde croit qu'à la fin du mercato on aura enfin notre dream-team... Et puis hop ! Le mercato se termine en queue de poisson et on se réveille sonnés et abasourdis par ses résultats toujours en deçà de nos attentes...
Alors on nous donne mille et une explications pour nous berner et on nous promet que la leçon est définitivement retenue, tout en appelant les uns et les autres à se satisfaire de l'effectif qu'on a fini par modeler, à venir en masse au stade et à encourager sans répit (ce qui se fait depuis quelques années déjà), en attendant le prochain qui sera à coup sûr meilleur sur tous les plans.
Mais qu'en est-il de ce mercato de l'été 2008 finalement ?
Personne n'est d'accord sur ses résultats et bien malin celui qui pourrait prévoir ses retombées à court, voire à moyen terme car beaucoup de paramètres entrent en considérations. Je vais donc essayer d'analyser ce qu'on a fait et proposer ce qu'on aurait dû faire.
D'abord, tout le monde s'accordait et le BD en premier que les derniers mercati n'étaient pas à la hauteur de nos aspirations. Pour ne pas revenir trop loin en arrière, on commence par l'année dernière quand une nouvelle équipe dirigeante a pris le relais, sous la conduite de M. Hamdi Meddeb, assez tard pour pouvoir bien négocier le mercato qui touchait à sa fin (un mercato se prépare des mois à l'avance). Celui de l'hiver dernier n'a pas été non plus meilleur, avec à la clé l'éclipse de M. Chokri El Ouaer qui a eu la responsabilité de mener à bon port le dernier marché hivernale. Résultat des courses, un mercato mi-figue, mi-raisin et des recrutements à l'aveuglette et à la dernière minutes notamment comme on a pris désormais l'habitude de vivre...
On a beau écrire ou crier sur les tous toits de planifier et traiter le mercato d'une façon autrement plus scientifique, mais les erreurs se répètent avec des similitudes déconcertantes. Après tout, ce phénomène social est devenu avec les changements des règles de la FIFA très complexe et un minimum d'organisation s'impose pour pouvoir tirer son épingle du jeu. On a appelé à ce qu'une commission de recrutement se crée, qu'elle soit permanente, travaillant dans la continuité en étroite collaboration avec le Staff technique et le BD, et surtout composée d'éminents techniciens dans tous les domaines, avec un melting-pot d'anciens joueurs et entraîneurs à l'expérience consommée qui savent dénicher les bons joueurs et surtout les perles rares parmi les nombreux joueurs surtout étrangers proposés, des agents et managers qui savent négocier et prospecter et enfin des mécènes qui savent apporter de l'argent, le tout chapoté par un président de commission qui aurait un charisme certain et surtout des relations partout dans le monde pour faciliter les recrutements. Cette commission devrait également avoir comme autres prérogatives de dresser un diagnostic de notre effectif, établir nos besoins, nos souhaits, les moyens dont on dispose pour faire nos emplettes et enfin prendre nos dispositions bien en avance pour limiter les aléas de dernière minutes. Certes, une telle commission n'aura pas la tâche facile, loin de là, mais avec une planification rigoureuse et des gens compétents, on pourrait réussir, du moins partiellement, ces mercati, ô combien compliqués.
Or au printemps dernier, une commission de recrutement a enfin vu le jour, annoncée en grande pompe et chapotée par un grand monsieur du football tunisien : M. Tarek Dhiab. Tout le monde était aux anges, on commençait même à jubiler car on aimait et faisait confiance à cette légende vivante. Mais voilà que pour des raisons qui dépassent même le cadre sportif et auxquelles il serait inutile de revenir, Tarek est parti quelques mois à peine après sa nomination. Il nous a quittés par la petite porte et ce, au grand désarroi de tous les espérantistes et au grand bonheur de tous nos détracteurs. Du coup, la commission de recrutement s'est auto-dissoute et on n'entend plus parler d'elle. Entre-temps on apprend timidement le retour en catastrophe de M. Badine Tlemçani, dont les résultats en matière de mercati gérés et réparés durant son mandat avec M. Aziz Zouhir n'étaient pas pourtant flatteurs, loin de là. Bref on a tout compris, il s'agissait plutôt d'un retour à la case départ !
Le mercato de l'été est bel et bien terminé maintenant, mais avant de l'analyser, on devrait quand même nous arrêter sur cette manière de ne bouger ou presque que durant les derniers jours. On attend toujours la dernière seconde de la dernière minute du dernier jour du marcato pour finaliser à la hâte des achats, des prêts ou des ventes, jusqu'à parfois même rater quelques transactions, faute de temps alors que le mercato a duré deux mois, soit du 1er juillet au 31 août et ce, sans compter les préparatifs qui sont sensés commencer bien plus tôt. Nos responsables (je parle des responsables tunisiens en général) devraient faire une demande à la CIO afin d'inclure le mercato parmi les épreuves des jeux olympique, tellement ça demande de la précision, de l'adresse et surtout du finish. Avec elle comme épreuve supplémentaire, on est presque sûr de glaner une médaille d'or à chaque olympiade... Mais trêve de plaisanterie, on n'arrêtera jamais de dire que les transactions de dernière minute ont plus de chance de foirer que de réussir.
À mon avis et ça n'engage que moi, je trouve qu'on a raté partiellement notre mercato. C'en était un comme ses prédécesseurs, avec une précipitation coupable et sans aucune planification, ni maitrise de l'art des transactions. Après tout, c'est normal que je mesure le mercato par rapport à moi-même, du moment que le BD n'a daigné glisser un mot sur aucun objectif tangible. Or, notre effectif est devenu assez pauvre au fil des ans, du moins en qualité. C'est l'effet inéluctable de tant de mercati non réussis, pendant que d'un effectif étoffé à la fin du siècle dernier, on est arrivé à un ensemble qui laisse à désirer. Bien évidemment on ne pourrait jamais rectifier et corriger nos fautes cumulées aux fil des ans en un seul mercato, mais il aurait fallu commencer comme mentionné précédemment par faire un diagnostic précis et établir une stratégie à court et moyen terme afin de combler un tant soit peu nos lacunes.
Alors pour être honnête, le moyen terme est sauf avec deux recrues locales de valeur, ajoutées à une autre réalisée au dernier mercato, et ce, sur les six révélations de l'équipe cadette de Kanzari, à savoir Ifa, Hadhria, Sassi, Ayari, Msakni et Tlili. Nous avons fini par ajouter les deux derniers à Ayari, pendant que nos concurrents directs n'en ont chipés qu'un seul (Ifa pris par le Club Africain et Sassi par l'Étoile, pendant que Hadhria était clubiste d'origine). Ceci dit, ces joueurs de par leur jeune âge ne seront pas immédiatement compétitifs et nous ne pourrons juger de leur valeur véritable dans l'équipe fanion que d'ici une ou deux saisons ... qui sait ?
Par contre pour le court terme, ça laisse vraiment à désirer. D'abord, il y a eu deux départs de poids pour fin de contrats et indépendamment de l'appréciation de leur valeur ajoutée sportive, il s'agissait des capitaines de notre équipe (Zaïem et Chaâbani) et il fallait trouver des remplaçants du même niveau sinon meilleurs. Ensuite, il y a eu le départ d'Aboucherouane, logique car il ne lui reste qu'une année de contrat et le vendre au double de son coût initial (on parle de 600 mille euros), je trouve sincèrement que c'est une bonne affaire, bien que «Boucha» soit le seul parmi les départs qui est resté à travers la gorge pour beaucoup de nos supporters, tellement il était aimé et respecté.
Pour les recrutements on a traîné fort longtemps sur des joueurs qui auraient pu apporter le plus escompté pour remédier aux départs annoncés plus haut, pour finalement rater les arrivées des Abdi et Boujelbène pour une raison ou une autre. Ensuite, on s'est rabattu sur un joueur axial inconnu qu'on a déterré au Maroc, Zakroumi, après avoir cru qu'il était l'oiseau rare à la suite d'une double confrontation contre son équipe divisionnaire. Et au lieu de faire vite et bien, en supposant qu'on ait été sûr de notre coup, on a fait traîner les choses car on était occupés soi-disant par la Coupe de la Confédération - comme si connaître ses prédispositions demandait des semaines de supervision -. Résultat de ces balbutiements, un fois retourné chez lui après des tests qui n'ont que trop duré, on a décidé de relancer l'affaire, faute de mieux, en envoyant des émissaires sur place. Mais il était trop tard, le Raja est entré en lice et son prix a flambé. Et puisqu'on a un besoin urgent d'un joueur axial (quoique je rejoigne M. Dhiab en pensant sincèrement qu'il est insensé de vouloir recruter un étranger pour un poste de défenseur), on a recruté ce Loué qui a peut-être un CV assez honnête, mais quand on se balade du côté des sites du Raja et surtout de Strasbourg (ses anciennes équipes), on ne lit que du mal sur lui surtout côté hygiène de vie. Et ce ne sont pas ses 95 kg et ses deux ans d'inactivité qui sont là pour nous rassurer.
Je passe vite sur notre manie à inviter des joueurs de tous bords qui viennent à nos frais - ou les leurs, mais tel n'est pas le problème principal - passer des jours de villégiature dans notre parc, s'entraîner, bouffer et se divertir - il ne manquerait qu'une piscine dans notre hôtel avec la canicule de l'été et pourquoi pas une boite de nuit - avant de repartir comme ils étaient venus, s'avérant pour l'écrasante majorité des flops ... pourtant annoncés (des inconnus).
Vous allez me dire, mais où est le problème ? Je répondrais que c'est un constat d'échec car normalement on devrait recruter des joueurs que la commission a suivis depuis longtemps, qui répondent à nos besoins et leur venue en Tunisie n'est nécessaire que pour la visite médicale et la négociation finale du transfert.
Je ne parlerai pas non plus du joueur champion du monde cadet annoncé en grande pompe et avec fracas et alors qu'on nous a annoncé que tout est fait selon les règles de l'art et ça sera le grand scoop de l'été, il s'est avéré que le mec s'est volatilisé du côté de la Russie. Certains prétendent qu'il aurait quand même transité par le Parc B, mais passons !
Enfin, on a fait un forcing à la fin pour recruter ce qu'il y a sous la main et on a pu avoir Mbélé sous forme de prêt, un joueur certes précédé d'une excellente réputation, mais qui joue dans un poste où nos besoins se font le moins sentir, puisqu'avec les départs forcés mentionnés plus haut, conjugué avec la fuite de Bekri qui était au moins une bonne doublure de Chammam, nos besoins tournent plus du côté de la défense - axe et arrière gauche - mais aussi du côté du milieu de terrain, devenu le talon d'Achille de notre équipe. Or, un autre attaquant serait toujours le bienvenu, bien que Bienvenu n'en soit pas convaincu, mais on avait d'autres priorités vous en convenez.
Quand j'ajoute à tout cela, les petits feuilletons qui ont précédé ceux ramadanesques et qui se sont terminé en queue de poisson, comme l'éventuel recrutement de Gharbi et surtout la pathétique histoire de recrutement de Mrabet et avant eux l'autre affaire du joueur béjaois Olivier qui a défrayé la chronique durant l'été, on peut déduire, sans trop se tromper, que notre marché était archaïque, sans ligne directrice et surtout avec une absence totale de planification, voire de stratégie visionnaire.
Rien qu'à voir la liste des 25 joueurs inscrite à la compétition de la Ligue arabe des champions (quoique j'aie beaucoup à dire sur cette compétition qui n'a de sportif que le nom, étant plus une loterie avec des gros lots qu'autre chose) et comment le nom de Felhi y figure, alors qu'il a été prêté en dernière minute au CSHL, comment Bilel Yaken, lui aussi faisant partie de la liste, a failli atterrir au CAB, n'eut été un désaccord de dernière minute entre les parties et enfin Bienvenu, par contre lui non inscrit dans la liste, lui qui a fait tout le temps banquette pour se réveiller ou plutôt dites ... faire réveiller ceux qui décident de son sort à la dernière minute, il est évident qu'il y a des choses qui ne tournent pas rond quelque part. Pis ! Quand je pense que la même erreur a été faite en janvier dernier, quand aucun parmi les nouvelles recrues à l'époque n'a été inscrit, voire ajouté, à la liste envoyée à la CAF, laissant le staff technique torturer ses méninges afin de constituer deux équipes, une pour les compétitions locales et une autre pour la CC et qu'on a frôlé le pire en faillant être exclus de cette compétition par les divisionnaires marocains de Barnoussi, avant d'être finalement éliminés par la suite sans gloire par une Etoile loin de sa forme «japonaise», mais qu'on n'a pu affronter à armes égales, avec un effectif cachectique et spolié de ses quelques meilleurs éléments (Eneramo, Bokungu, Bienvenu, sans parler de Mzali, faute de faire jouer W. Yaken parti en fin de contrat à la même Étoile ... excusez du peu !).
Quand on se remémore que beaucoup de joueurs achetés en dernière minute et sans planification sont venus chez nous pour avoir des salaires et faire banquette avant de les renvoyer (Adriano) ou au mieux les prêter (Felhi) des fois même à leur équipe d'origine (Lachkham) et je dois en oublier, sans parler de B. Yaken qui a failli également se rajouter à cette liste, tout comme Bienvenu qui, sans certaines circonstances et la pression du public, aurait connu le même sort - d'ailleurs il n'est pas encore sorti de l'auberge encore - je me tairais par la même sur le recrutement honteux de Touati, mais surtout et c'est ce qui nous intéresse en premier lieu, celui de Chibani dernièrement, qu'on a signé pour cinq ans avant de le prêter illico presto au même club divisionnaire, il y a de quoi avoir des cauchemars pour ces gros gâchis !
Alors que reste-t-il de ce mercato ?
On a recruté deux bons joueurs Juniors (Msekni et Tlili) qui nous seront très utiles dans le moyen terme.
Il y a eu également Achour pour remplacer Zaïem. Certes, la valeur de Achour sur papier ne vaut pas celle de Kamel, mais d'après les premiers matchs de Achour augurent d'une montée en puissance de Tarek et on peut bien espérer qu'il suive le chemin de Mnari, lui aussi ex-usémiste. Pour le moment, il a su arracher une place de titulaire et bien que la concurrence dans son secteur ne soit pas si rude, il s'agit certainement d'une satisfaction pour lui et pour ses recruteurs.
Par ailleurs, on a recruté Konan, un joueur dont on dit beaucoup de bien, mais étant blessé pour le moment - il le fallait bien ! -, on n'a rien vu pour pouvoir le juger.
On a recruté un joueur de rugby - pardon un défenseur axial - un certain Loué dont le poids flirte avec le quintal et sur lequel les avis sont contrastés. En tout cas il a été recruté au pif et sans un suivi rigoureux, ce n'est sûrement pas la clause libératoire ajoutée à son contrat qui va rendre son recrutement une belle affaire, à moins qu'il ne démentît tous ses détracteurs et apportera le plus escompté et c'est tout le mal qu'on lui souhaite.
On a recruté enfin Mbélé sous forme de prêt. Malgré sa valeur jugée sure, je demeure persuadé que c'est un recrutement de dernière minute qui répond plus à la demande du public frustré par tant d'échecs que par une stratégie rationnelle faite à la suite d'une planification scientifique et rigoureuse. Cette dernière recrue est pour beaucoup un coup de maître, alors que pour moi elle demeure sur le plan extra-sportif de la poudre aux yeux, indépendamment encore une fois de sa valeur sportive ne souffre d'aucune discussion. Mais quand on a Eneramo, Bienvenu, Konan, dont on dit que du bien, et ce, sans compter l'éventuel retour de Ltifi, nos besoins sont bien évidemment ailleurs (défense et surtout milieu de terrain).
Je ne parlerais pas non plus des quelques manoeuvres bizarroïdes, tels que le prêt de Saâfi, auquel on n'a pas donné sa chance réelle selon plusieurs avis, le tout conjugué avec le retour de Jabeur dont personne n'attend plus grand-chose. Mais là c'est plus du ressort du staff technique que du mercato en lui-même et c'est un terrain où je ne veux nullement m'immiscer.
Le rideau est donc tombé sur ce énième mercato avec le goût de l'inachevé, mais surtout avec les mêmes erreurs qui se répètent à chaque semestre. Le temps n'est plus aux lamentations, mais on espère tous que les joueurs recrutés attisent nos craintes en réussissant brillamment leur passage sous les couleurs Sang et Or. Entre-temps, on va replonger dans nos rêves pour que le prochain mercato serait bien meilleur, du moins dans sa préparation notamment, et d'ici-là concentrons-nous sur ramadan puisque la FTF nous a offre un autre répit.
Alors vivement la trêve et au prochain... mercato... pardon je veux dire à la prochaine reprise du championnat, décidemment j'ai attrapé le virus du mercato...