Cinq mois après son arrivée à la tête de l'Espérance Sportive de Tunis, Miguel Cardoso a vécu dimanche soir un derby de la capitale cauchemardesque qui l'a profondément marqué. Témoin de violences inimaginables, le technicien portugais a poussé un coup de gueule retentissant, remettant même en cause son avenir au club.
Arrivé en Tunisie avec l'ambition de contribuer au développement du football local, Cardoso a vite découvert les rouages d'un championnat tunisien parfois tumultueux. Mais jamais il n'aurait pu imaginer les horreurs auxquelles il a été confronté lors du derby face au Club Africain. Jets de projectiles, fumigènes, gaz lacrymogène... Le match a sombré dans le chaos, laissant l'entraîneur espérantiste dans un état de sidération et de colère noire.
"Ce qui s'est passé [dimanche] soir n'a pas sa place dans le foot. C'est tout sauf du football," a déclaré Cardoso avec une émotion palpable. "Pour moi, le foot est une façon de vivre, pas une façon de mourir. Je ne suis pas venu en Tunisie pour vivre des moments comme ça. Voir le sang de mon adjoint couler de sa tête, recevoir des projectiles de toutes parts, ce n'est pas normal !", a-t-il tonné en conférence de presse d'après-match.
Au-delà de la violence qui a envahi le stade Radès, Cardoso s'est insurgé contre l'inaction des autorités face à de tels débordements. "Ce qui s'est passé dans le stade [dimanche] est triste et désolant, pas seulement pour moi et pour les joueurs, mais aussi pour la fédération tunisienne qui permet qu'un tel match se déroule jusqu'au bout. On ne peut pas jouer un match avec du gaz lacrymogène sur le terrain, ni avec des batailles dans les tribunes. On ne peut pas être content de gagner dans de telles circonstances et pourtant je tenais à gagner ce match pour l'offrir à nos supporters - aujourd'hui absents - qui nous ont suivis partout cette saison et qui sont déçus de notre défaite finale en Ligue des champions."
Le coach a exprimé sa profonde inquiétude quant à l'avenir du football tunisien s'il continue sur cette voie. "Ce n'est pas comme ça que le niveau du football tunisien s'améliorera. Je connais les derbys, la rivalité, mais là c'est trop ! Un jour il va y avoir mort d'homme si ça continue ainsi sans rien faire."
Cardoso espère que son président, ainsi que les dirigeants du Club Africain et de la fédération, partageront son mécontentement et prendront des mesures pour changer les choses. "Je suis certain que mon président, comme moi, n'est pas content de la situation et j'espère que c'est aussi le cas pour les dirigeants du Club Africain ou les responsables de la fédération. Si tous ceux-là ne sont pas contents de ce qui se passe, ils finiront par trouver des solutions."
Malgré son attachement à la Tunisie et à l'Espérance de Tunis, Cardoso est sérieusement préoccupé par ce qu'il a vécu. "J'aime beaucoup être parmi vous, depuis le premier jour je me suis senti à l'aise ici, j'ai vécu des moments formidables et je l'ai exprimé à plusieurs reprises. Mais ce que j'ai vécu [dimanche] m'a fait réfléchir. J'ai dit à Riadh [Bennour] dans les vestiaires qu'il est peut-être meilleur pour moi que je parte, car je ne m'y retrouve pas dans ce qui s'est passé. Je suis désolé", a-t-il confié, la voix pleine d'amertume.
L'avenir de Miguel Cardoso à l'Espérance Sportive de Tunis est désormais incertain. Ce qui est sûr, c'est que le technicien portugais a vécu un traumatisme dimanche soir, et qu'il attend des actes forts de la part des instances dirigeantes du football tunisien pour que de tels événements ne se reproduisent plus jamais.
En conclusion, Cardoso a réitéré son appel à une réforme profonde et immédiate. "Ce n'est pas ça le foot, ce n'est pas comme ça qu'on va exporter le football tunisien, ce n'est pas comme ça qu'on va éduquer les jeunes joueurs. Quel exemple leur donne-t-on ?"
Le coup de gueule de Cardoso a ébranlé le monde du football tunisien. Il est désormais à espérer que ses paroles ne tombent pas dans l'oreille d'un sourd et que des mesures concrètes soient prises pour mettre un terme à la barbarie dans les stades.