Nabil Maâloul, le visionnaire, confiant avant d'affronter Al Sadd du Qatar en Coupe du Monde des Clubs. © Getty Images

CMC 2011

Maâloul voit tout avant tout le monde

Nabil Maaloul avait déjà sa place dans le livre d'or de l'Espérance Sportive de Tunis pour les exploits réalisés en tant que joueur. Il y figure désormais en première page après avoir mené depuis le banc de touche le club à un triplé historique, raflant coup sur coup le championnat, la coupe nationale et la Ligue des champions de la CAF. Une performance que même les plus optimistes supporters n'auraient pu imaginer en début d'année. C'est justement ce qui fait la différence Maaloul et les autres fidèles du club Sang et Or. Lui avait tout prévu…

"Je l'ai dit à ma première conférence de presse, avant mon premier match à l'Espérance", rappelle-t-il au micro de FIFA.com quelques jours avant l'entrée en lice de ses troupes en Coupe du Monde des Clubs de la FIFA. "Mon premier objectif était de gagner la Ligue des champions. Les deux années précédentes, l'Espérance a gagné le championnat et joué - et perdu - une finale de Ligue des champions. Je me suis dit que pour le club, les supporters et le président, l'objectif était de faire mieux. Donc de gagner la Ligue des champions..."

Ce que le technicien tunisien n'avait en revanche pas vu venir, c'est qu'il bénéficierait d'un coup de pouce du destin. Ou plutôt de l'Histoire. "La révolution tunisienne nous a énormément aidés, puisque le championnat s'est arrêté pendant deux mois", explique-t-il en référence aux changements connus par le pays en début d'année. "J'étais persuadé qu'on allait jouer les premiers rôles parce qu'on a fait une préparation foncière très bonne, qui nous permettrait de monter en puissance et d'être efficace jusqu'au mois de décembre."

A la hauteur des ambitions

Si la tension est retombée dans les rues, elle était en revanche à son comble au Stade Olympique de Radès en juillet lorsque l'Espérance accueillait le géant égyptien d'Al Ahly, quatre fois champion d'Afrique depuis le début du siècle. "Ce match a été un déclic et m'a confirmé dans mes convictions que nous allions soulever la Coupe", confie l'adjoint de Roger Lemerre lors du sacre tunisien à la CAN 2004. "Nous venions de gagner la Coupe, mais c'était difficile de se reconcentrer après l'euphorie qui a suivi. En plus, j'étais privé de nombreux joueurs, blessés, suspendus ou non qualifiés. Pour un club comme l'Espérance, c'est déjà difficile de jouer sans un ou deux titulaires. Là, il m'en manquait quatre ou cinq ! Mais mes joueurs m'ont confirmé qu'ils étaient à la hauteur de nos ambitions."

Curieusement, ces joueurs sont pratiquement les mêmes que ceux qui avaient lourdement chuté en finale de l'épreuve un an avant face au TP Mazembe (5:0, 1:1). Entre les larmes de 2010 et les scènes de joie de novembre dernier, le changement principal se situe sur le banc. "L'effectif ressemble beaucoup à celui de l'année dernière, et pourtant, certains joueurs qui n'ont pas brillé les saisons passées viennent de faire une année exceptionnelle. C'est la preuve qu'ils ont progressé et su tirer le meilleur de leurs qualités", confirme Maaloul, avant d'oser avancer une explication. "J'ai été joueur, je sais ce qu'ils ressentent, ce que je dois leur dire, comment les conforter, et j'ai toujours trouvé les mots nécessaires pour faire en sorte qu'ils gardent les pieds sur terre."

Des mots, le stratège du Taraji n'en a pas utilisé beaucoup pour motiver ses troupes avant la finale, qui offrait au vainqueur un billet pour le Japon. "La réunion d'avant-match a été la plus courte de ma carrière", se souvient l'ancien joueur de l'EST, qui a terminé sa carrière sous les couleurs du grand rival, le Club Africain. "On est resté sept à huit minutes seulement, parce que j'avais déjà préparé ce match individuellement avec mes joueurs. Je savais qu'ils étaient prêts et qu'ils feraient honneur à leur club."

Des histoires à raconter

Encore une fois, Maaloul avait déjà lu le scénario : 0:0 à l'aller sur le terrain du Wydad Casablanca, victoire 1:0 au retour. Mais pour une fois, l'entraîneur s'est servi du passé pour prévoir l'avenir. "J'ai dit aux garçons qu'ils allaient entrer dans l'histoire du football tunisien et de l'EST. De grandes générations de ce club n'ont pas réussi ce triplé historique, et vous serez la première génération de l'EST à participer à une Coupe du Monde des Clubs. C'est très important", détaille l'entraîneur de 49 ans. "Vous ne pouvez pas réaliser ça maintenant, mais quand vous aurez mon âge, quand vous aurez terminé votre carrière, vous aurez un pincement au cœur et vous serez fier de raconter ce que vous avez accompli."

Les Ousama Darragi, Youssef Msakni, Harrison Afful et autres Mejdi Traoui auront donc de belles histoires à relater dans quelques années, notamment leur parcours en Coupe du Monde des Clubs de la FIFA 2011, qui débutera en quart de finale contre les Qatari d'Al-Sadd le dimanche 11 décembre. A la clé en cas de victoire, le droit d'affronter le FC Barcelone. Mais les talents de devin de Maaloul ne vont pas aussi loin.

"Si nous arrivions à aller en demi-finale et jouer honorablement contre Barcelone, ce serait grandiose pour l'équipe, pour moi, pour l'histoire du club", annonce-t-il, avant d'abandonner le conditionnel pour repasser à l'indicatif. "Gardons les pieds sur terre : d'abord Al-Sadd, puis adviendra ce qu'il adviendra."

"Mais j'espère quand même pouvoir laisser une trace dans ce club", conclut l'homme qui a d'ores et déjà permis à l'Espérance de réaliser la meilleure saison de son histoire. Confirmation : Maaloul connaît déjà l'avenir.